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puce L'Atelier « Eau et Agriculture » des rencontres "Eau, Planète et Peuples 2" au Forum Social Mondial de Tunis 2015
AGTER a co-animé les rencontres EPP2. Une petite synthèse de son contenu et des messages aux Etats et à la Communauté Internationale vient d’être éditée
Samir El Ouaamari
PDF - 811.2 ko
FSM-2013. Eau, Planète, Peuples.

Les rencontres « Eau, Planète et Peuples 2 » (EPP2) ont eu lieu en mars dernier dans le cadre du Forum Social Mondial de Tunis. Elles se donnaient pour objectif d’être un lieu pour la discussion, la sensibilisation, et la mobilisation de la société civile internationale autour de la problématique de l’eau, avec, en perspective, la définition des Objectifs du Développement Durable (ODD) post-2015 et la Conférence des Parties de la Convention des Nations Unies sur le Changement Climatique ou COP21 qui aura lieu à Paris en décembre.

En partenariat avec de nombreuses organisations – France Libertés, Coalition Eau, le CRID, Coordination Ile-de-France et le collectif Papillon entre autres – AGTER a animé l’atelier intitulé « Eau et Agriculture ». Trois autres ateliers – « Eau et Droit », « Eau et Climat » et « Eau et Energie » - complétaient le programme des rencontres EPP2. Une petite synthèse du contenu de ces ateliers et des messages dirigés aux Etats et à la Communauté Internationale vient d’être éditée. Vous pouvez le télécharger en cliquant sur l’icône ci-contre.

L’atelier Eau et Agriculture animé par AGTER

L’atelier Eau et Agriculture se donnait pour objectif de questionner les différents modèles de production agricole qui mobilisent des ressources en eau, et de voir lesquels sont à même de mieux contribuer à satisfaire l’intérêt de la société dans son ensemble. Les interventions sont allées dans ce sens, une bonne partie étant référées au cas particulier de la Tunisie et à l’eau d’irrigation. La discussion avec les participants a permis d’approfondir certains aspects du cas tunisien et de soulever des solutions de portée globale concernant aussi bien des possibilités techniques pour augmenter les disponibilités en eau et favoriser sa conservation dans les sols, que des questions de gestion, de gouvernance des ressources et d’équité dans les modes de production et de consommation.

Qui était présent ? Comment l’atelier s’est-il déroulé ?

Les intervenants invités étaient les suivants :
-  Camille Jahel, doctorante agroéconomiste au CIRAD, membre d’AGTER, France.
-  Abdelkrim Anbari, agriculteur, porte-parole de RACCORD-Maroc
-  Mohamed Elloumi, chercheur en Economie Rurale, INRA –Tunisie
-  Irène Carpentier, doctorante en Géographie à Paris I, France.
-  Salah Bechir, agriculteur et membre de l’Association de Sauvegarde de l’Oasis Chenini.

L’atelier s’est déroulé en trois temps :

1- Réflexion sur les modèles de développement de l’agriculture irriguée (Camille Jahel, Abdelkrim Anbari).

2- L’agriculture et l’eau en Tunisie. Un cas particulier porteur de leçons de caractère global (Mohamed Elloumi, Irène Carpentier, Salah Bechir).

3- Débat avec le public (environ 60 personnes)

De quoi a-t-on parlé ?

Dans un premier temps, Camille Jahel et Abdelkrim Anbari ont présenté deux situations dans lesquelles l’établissement de grandes structures de production capitalistes empiète sur l’accès aux ressources (eau et terre) des agricultures familiales et paysannes (au Nicaragua et au Maroc respectivement). Pourtant ces dernières sont à même de créer plus de richesse et d’emploi que les grandes exploitations à salariés (cas du Nicaragua) et font preuve de résilience par le biais de pratiques agricoles qui s’adaptent aux disponibilités en eau d’irrigation et de pluie (cas du Tadla, au Maroc). L’exemple du Nicaragua démontre que les projets de soutien à l’agriculture familiale (en la pourvoyant de quelques moyens supplémentaires) sont susceptibles de permettre à celle-ci d’exprimer tout son potentiel. (Voir l’étude réalisée par Camille Jahel sur le site de ressources documentaires coordonné par AGTER)

Le cas de l’agriculture tunisienne a été abordé ensuite. Mohamed Elloumi en a brossé un tableau général. La Tunisie est structurellement en situation de stress hydrique. Si les politiques publiques (périmètres publics dans les années 1960) ont soutenu dans un premier temps les petites exploitations dans leur accès à l’eau pour atténuer une certaine dualité de l’agriculture, la libéralisation de l’économie qui fait suite aux Plans d’Ajustement Structurel du milieu des années 1980 va renverser cette tendance. Des investisseurs privés vont mettre en œuvre des grandes exploitations reposant sur le pompage d’eaux souterraines profondes. Ce développement a conduit à l’abandon progressif de nombreuses unités de production familiales qui ne disposent pas de moyens pour pomper l’eau des nappes phréatiques de plus en plus éloignées de la surface. Mohamed Elloumi souligne que l’exode qui a résulté de cette marginalisation de l’agriculture familiale est, en grande mesure à l’origine des révoltes de 2011.

Plus tard, Irène Carpentier a développé le cas particulier de l’agriculture oasienne tunisienne. Elle a tracé les différents moments de l’histoire récente des oasis tunisiens, qualifiée comme « l’histoire d’une dépossession » : à la gestion communautaire de l’eau d’irrigation se sont substitués les plans de développement et de gestion de l’irrigation étatiques et l’essor de nouvelles activités très consommatrices d’eau. Il serait donc nécessaire d’ouvrir un espace de dialogue pour la redéfinition de modes de gestion plus en adéquation avec les attentes et les enjeux sociaux d’un territoire local en mouvement. Irène Carpentier mentionne le cas des « militants oasiens » et des « agriculteurs locaux ». Pouvant être rangé parmi ces deux catégories, Salah Bechir expose finalement son expérience d’agriculteur dans l’oasis de Chenini. Il mentionne en particulier les difficultés liées à la réduction des tours d’eau d’irrigation qui fragilise fortement la paysannerie locale. Il propose un schéma différent d’agriculture reposant sur le renouvellement de la fertilité des parcelles à base de compost et l’utilisation des variétés locales adaptées aux conditions de stress hydrique que lui-même conserve et reproduit.

Suite à ces échanges d’expériences, le message suivant a été adressé aux Etats et à la Communauté Internationale dans la perspective de l’Agenda post-2015 et de la COP 21 :

« Nous demandons à la communauté internationale et aux États d’Enclencher un changement de paradigme au niveau des modèles agricoles…

1. … En soutenant les agricultures familiales paysannes dans la mesure où elles contribuent à créer richesses et emplois, tout en s’adaptant à la rareté de la ressource en eau et en répondant aux enjeux actuels de sécurité alimentaire et d’équité sociale.

2. … En régulant de manière stricte et contraignante les grands développements capitalistes qui reposent sur l’immobilisation de très grandes surfaces potentiellement irrigables, au détriment des réserves souterraines, des eaux de surface et des populations qui en dépendent.

3. … En investissant dans des techniques permettant d’accroître les disponibilités d’eau et d’en faire un usage durable, notamment celles fondées sur les principes de l’agroécologie.

4. … En établissant un dialogue démocratique permanent qui permette de consacrer le caractère de bien commun de l’eau et de discuter des alternatives en termes d’usages agricoles et de modes de gouvernance les plus conformes à l’intérêt collectif. »



 
 
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